J'ai la chance d'être en vie

03/01/2017
Histoires de patients
Lisa, 47 ans, Assistante puéricultrice, West Mersea, Royaume-Uni

J’étais au travail et j’ai commencé à sentir des fourmillements dans mon bras et du côté gauche du corps. Ma bouche s’est mise à pendre. J’ai ensuite su que j’avais fait un mini AVC.

Tout avait commencé quelques semaines auparavant, lorsque j’avais commencé à ressentir une immense fatigue et à ne pas me sentir bien. Le blanc de mes yeux avait prix une couleur jaune et une fois, j’avais eu du sang dans les urines. Le médecin a pensé que c’était peut-être une anémie, mais les résultats de mon analyse de sang ne sont pas arrivés à temps.

Ce qui m’est arrivé au travail était terrifiant mais par chance, mes collègues ont réagi sans tarder, en appelant immédiatement une ambulance. On m’a conduite au service des urgences de l’Hôpital général de Colchester. Ils ont d’abord cru à une migraine. J’ai été admise aux urgences et tout au long de la journée, les symptômes n’ont pas cessé d’empirer. On était en train de me faire un prélèvement sanguin lorsque j’ai fait une attaque. À partir de ce moment, c’est le trou pour moi.

La seule chose dont je me souvienne ensuite, c’est de me réveiller et de voir des lumières qui brillaient. J’avais les idées confuses et je ne savais pas où j’étais. Je n’avais aucun souvenir de mon transfert à l’Hôpital University College de Londres (UCLH) en ambulance. J’étais en soins intensifs.

Les infirmières étaient très gentilles et très patientes avec moi. Il a fallu qu’elles me répètent à plusieurs reprises que j’avais une maladie qui s’appelait un PTT (purpura thrombotique thrombocytopénique) et que c’était très grave. Je n’arrivais pas à croire que c’était si grave que cela vu que je me sentais tellement mieux qu’au cours des semaines précédentes. Je me suis également réveillée plutôt bizarrement, avec un fort accent cockney de Londres. Je trouvais que tout était très drôle et je n’arrêtais pas de faire des blagues, même si à l’intérieur de mon corps, ce qui se passait n’avait rien d’amusant.

Le PTT est une maladie si rare que c’est quasi inimaginable de penser que c’est ce que j’avais. Mais c’était bien le cas. J’ai eu la chance que l’hématologue de l’Hôpital général de Colchester connaisse cette maladie rare. S’il n’avait pas réagi aussi vite et s’il ne m’avait pas fait transférer vers le centre spécialisé, je ne serais peut-être pas là aujourd’hui.

Je suis restée en soins intensifs pendant quelques jours, puis on m’a mise dans une chambre individuelle avec une magnifique vue sur Londres. Mon traitement comportait un échange plasmatique, ce qui est une véritable machine à miracle. Pendant plusieurs heures d’affilée, j’avais plusieurs aiguilles dans le cou tandis qu’on me soustrayait mon plasma pour le remplacer par celui d’autres personnes. J’ai subi ce processus maintes et maintes fois, jusqu’à ce que ma numération plaquettaire revienne à la normale. Je suis restée à l’hôpital pendant deux semaines.

C’est presque un hôtel de luxe, avec un personnel tellement gentil, attentionné et prévenant. Le spécialiste qui me suit, le Dr Marie Scully, et tout le personnel m’appelaient par mon nom. Malgré les circonstances de mon séjour, c’est un bel endroit. Vous avez l’impression que vous êtes le seul patient.

Toute cette expérience a été extrêmement traumatisante pour moi et pour ma famille. Ma maman, qui a 70 ans, ne comprenait pas ce qui se passait, et le fait qu’il lui était difficile de me rendre visite pendant mon séjour à l’hôpital à Londres n’arrangeait pas les choses. Ma fille, qui a 13 ans, était en vacances en Floride avec son père lorsque je suis tombée malade. Ma maman a dû attendre que son avion se pose pour l’appeler et lui dire que j’étais inconsciente aux soins intensifs.

Après ce qui s’était passé, ma fille ne voulait plus s’éloigner de moi ou me laisser aller quelque part. Elle redoutait que cela m’arrive à nouveau. C’est le plus affreux avec ma maladie : impossible pour le corps médical de dire si je vais faire une rechute ou pas.

Le Réseau PTT est un groupe de patients constitué par des patients pour soutenir les patients et leurs familles. Le PTT est une maladie tellement rare que c’est extraordinaire de pouvoir rencontrer d’autres patients qui ont vécu la même chose que vous. Cela tisse des liens très forts instantanément. Plus les gens sont informés sur cette maladie, mieux c’est. Personne dans mon entourage n’en avait jamais entendu parler avant que cela ne m’arrive. En tant que patients, nous voulons savoir pourquoi nous avons eu un PTT et si nous allons rechuter.

J’ai participé récemment à une journée consacrée aux patients atteints de PTT à Londres. C’était formidable de voir que plusieurs membres du personnel de l’hôpital avaient aussi répondu à l’appel. Ils avaient choisi de passer une partie de leur temps libre avec nous, ils se sentent vraiment concernés. Nombre d’entre nous ont également participé à une marche pour la recherche et l’information sur le PTT lors de l’édition 2016 du London Bridgathon organisé par l’Hôpital University College de Londres, qui lève des fonds et informe sur la maladie. J’ai rencontré un membre du personnel du laboratoire de transfusion de l’hôpital et quand je lui ai dit mon nom, il m’a dit : « Je connais votre sang ! » Il ne m’avait jamais rencontré, mais il connaissait mon histoire !

Ce n’est pas facile de composer avec la vie lorsqu’on a vécu une expérience de mort imminente. J’ai dû m’arrêter de travailler pendant trois mois et il m’a fallu du temps pour récupérer physiquement. Nombre des patients que j’ai rencontrés ont connu des effets secondaires postérieurs à leur PTT, notamment des dépressions ou une fatigue extrême, mais cela n’a pas été mon cas. Je mène à présent une vie parfaitement normale. Je fais un travail très physique puisque je garde de jeunes enfants. Je ne reste jamais assise. Je suppose que j’ai réagi de façon relativement positive à ce qui m’est arrivé. Je sais que je fais partie des chanceux qui ont survécu. Je suis bien plus heureuse qu’avant. Je suis tellement reconnaissante d’être encore en vie. Je suis encore plus convaincue qu’avant qu’il faut vivre à fond l’instant présent.

NOUS AVONS VU DES PERSONNES ATTEINTES DE PTT MOURIR TRÈS JEUNES ET TRÈS RAPIDEMENT.

DR MARIE SCULLY -HÔPITAL UNIVERSITY COLLEGE DE LONDRES

Le purpura thrombocytopénique thrombotique (PTT) est un trouble de la coagulation potentiellement mortel extrêmement rare qui peut survenir à tout moment de la vie et touche en général les femmes entre 30 et 40 ans. Cette maladie auto-immune entraîne la formation de caillots sanguins dans les petits vaisseaux dans tout le corps et peut endommager des organes tels que le cerveau, le cœur ou les reins.

Le PTT se manifeste de façon très brutale et les personnes qui en souffrent se présentent souvent au service des accidents ou des urgences, 10 % d’entre elles ayant déjà plongé dans un coma. Nous avons vu des personnes atteintes de PTT mourir très jeunes et très rapidement. Une fois que vous avez assisté à cela, vous ne l’oubliez jamais.

Un retard de diagnostic peut avoir des conséquences considérables sur le risque de décès du patient. Dès que le PTT est identifié, le patient est traité par échange plasmatique, ce qui agit comme un processus de nettoyage, en enlevant son plasma et ses anticorps et en les remplaçant. L’échange de plasma dure jusqu’à ce que le taux de plaquettes sanguines augmente ; c’est à ce moment qu’on l’on observe une rapide amélioration clinique.

Avant l’existence de l’échange plasmatique, le taux de mortalité était de 90 %. Aujourd’hui, le taux de survie est de 90 %. Notre priorité, c’est de faire en sorte que nos patients survivent à la phase aigüe de la maladie.

Les patients sont souvent confrontés à des problèmes chroniques résultant d’une expérience effrayante de mort imminente. Ils deviennent anxieux et c’est la spirale vers le bas, d’où une dépression clinique. Il existe une probabilité élevée (de 30 à 50 %) de rechute des patients. Ces personnes ont des enfants en bas âge, un emploi et des partenaires. Leur vie est gravement perturbée et elles vivent dans la crainte de revivre ce qu’elles ont connu. Le PTT peut radicalement bouleverser la vie d’un individu.

L’Hôpital University College de Londres est un centre d’excellence dans la prise en charge du PTT. Nous avons pour objectif de parvenir à un diagnostic plus rapide pour les patients, d’améliorer le traitement et la vie après une PTT, notamment en trouvant des moyens de prévoir qui va rechuter.

Avec un PTT, les choses peuvent très vite mal tourner. Nous agissons rapidement et nous traitons les patients comme nous aimerions nous-mêmes être traités. Nous sommes tous animés par cette philosophie. Autrement, nous ne serions pas des êtres humains.

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